Je vous propose aujourd’hui une petite friandise que j’affectionne particulièrement: la lecture critique d’article.
On commence direct:
Introduction:
Wow, ça fait beaucoup d’auteurs tout ça. 45 ? Comment ça se fait qu’on en a autant ? Est-ce qu’il y en a que je connais dans le lot ? Bon, je mets ça dans un coin pour le moment.
Déjà l’article est gratuit. Je me demande pourquoi ? Wiley ne sont pas connus pour faire des articles gratuits de mémoire. Hmm.. Je note aussi pour plus plus tard.
Recommendations européennes sur l’insomnie, donc. Tout un programme.
Tout d’abord un peu de contexte. Pourquoi est-on gracié d’une mise à jour à la fin de l’année 2023 ?
Progress in the field of insomnia since 2017 necessitated this update
Ah, il a eu des progrès depuis 2017 dans l’insomnie, bonne nouvelle.
Je n’étais pas au courant ! La tension monte.
Pour le reste du papier, il semble qu’on va se servir du “grade” des recommendations, avec des grades (A), (B), (C) et (D), d’un niveau de preuve décroissant. Les auteurs nous détaillent ensuite plus précisément ce qu’ils entendent par là:
Tiens c’est marrant comme tableau. Est-ce qu’une RCT faite par un laboratoire (donc beaucoup plus souvent positive qu’une RCT “neutre”) est considérée comme une RCT de “haute qualité” ? Je ne suis pas sûr, mais pourquoi pas.
Le grade B est assez large, ça va d’une seule étude de cas contrôle jusqu’à la revue systématique d’études de cohortes de haute qualité.
Ca n’a pas grand chose à voir en terme de niveau de preuve, mais pourquoi pas, pourquoi pas..
Moi je suis con, je préfère qu’on me donne les données, après je mettrai les grades tout seul. Ou alors parler directement 1a, 1b, etc… Ca aurait été un peu plus précis, non ?
Par contre le papier entier consiste en une opinion d’experts; donc je considère qu’on est sur du grade D jusqu’à preuve du contraire.
Partie CBT-I
On a ensuite un pavé entier sur la CBT-I, à savoir la TCC-Insomnie, première intention.
La TCC pour l’insomnie c’est bien mais l’accès à la thérapie est toujours très limité; et donc on retrouve là un guideline un peu en décalage avec ce qu’on peut faire.
Mais c’est indiscutablement une première intention quand disponible.
Je passe, parce qu’il n’y a là rien de neuf, en tout cas rien qui justifiait de mettre les guidelines à jour; ça ne date pas d’hier.
Ca discute ensuite de thérapie digitale, c’est très certainement plus populaire qu’en 2017, je passe; mais on remarquera que certains auteurs on quelques liens d’intérêts avec les thérapies digitales proposées.
Partie Pharmaco
On attaque les traitements pharmacologiques, résumés dans ce tableau.
Alors là il y a une petite erreur avec la promethazine je pense, c’est pas un “antihistaminique”, c’est une phénothiazine tout ce qu’il y a de plus classique, mais ça n’est pas bien grave, c’est chipoter.
Par contre je ne vois rien de neuf dans ce tableau; à part le daridorexant.
Rien d’autre qui justifie de mettre les recommendations à jour.
Tiens tiens.. Ca tomberait pas mal ça, quelques mois avant que cette “nouvelle” molécule arrive sur le marché, on se retrouve avec une guideline mise à jour. Le hasard fait bien les choses.
Je me demande si la ribambelle d’auteur a un lien avec le laboratoire qui fait le daridorexant (Idorsia) ? Est-ce que je suis en train de perdre la raison ? Ou est-ce que ce sont les thérapies digitales de la TCC qui justifiaient d’une mise à jour ? A voir.
Les benzodiazepines et apparentés
On apprend ensuite que les BZD et les agonistes des récepteurs aux benzos (BZAR dans le tableau) ne concernent des études que de 6 mois tout au plus - et que pour l’eszopiclone:
Most of the meta-analyses demonstrate that BZ and BZRA drugs have positive effects on sleep when taken up to a maximum of 4 weeks. Beyond that timeframe, the meta-analyses by Liang et al. (2019) and Rösner et al. (2018) suggest positive effects of eszopiclone for a period of application of up to 6 months in certain cases[…]
Alors là par contre je ne comprends plus rien.
Déjà, pourquoi avoir mis les deux classes dans la même catégorie ? Ca ne fait pas très sérieux. Mais surtout, je ne suis pas expert sur le sommeil, et je suis au courant d’études positives sur de l’eszopiclone après un an d’utilisation (ici), sur le zaléplon sur des sujets âgés pendant 1 an (ici), d’une autre étude sur 1 an avec du zolpidem dans laquelle l’effet s’est maintenu sans que les doses n’aient été augmentées (ici)...
Bah ça fait beaucoup d’oublis là non ? Ils ont juste oubliés les études positives qui ont duré plus de 6 mois.
Pourtant c’est blindé d’experts. Que s’est-il passé ?
On a ensuite un petit rappel des effets secondaires des benzos et apparentés:
Side-effects associated with BZs and BZRAs used include the development of tolerance and dependence, nocturnal confusion and falls (Treves et al., 2018), negative effects on cognitive functioning including memory impairment (Barker et al., 2004; Stranks & Crowe, 2014), hangover effects with associated impairments in driving capability, especially from substances with long half-lives (Rapoport et al., 2009), as well as rebound insomnia after withdrawal. Concerning the development of dependence from hypnotics, some authors postulate that in Germany up to a million people may be affected (Soyka, 2021).
Tolérance, confusion nocturnes et chutes (tiens , j’ai eu 3 patientes qui ont eu ça avec du daridorexant en 2 semaines) problématiques cognitives, tolérance, rien de neuf sous le soleil.
Ah ! Ils parlent maintenant de l’étude de l’eszopiclone sur 12 mois; mais recommandent quand même de ne pas l’utiliser plus de 4 semaines:
Although eszopiclone has been investigated in studies for 3 and 6 months and with long-term data for up to 12 months (see overview by Rösner et al., 2018), it should be used with caution when used beyond 4 weeks given its mechanism of action, as with other BZRAs
Ce sont des gens très prudents.
Je me demande s’il y a un intérêt à taper sur les vielles molécules qui ne rapportent rien et qui sont des concurrents directs des nouvelles molécules comme la daridorexant ? Hm…
Les antidépresseurs sédatifs
Ils passent ensuite aux “antidépresseurs” sédatifs.
Ils précisent tout de suite sur la chose la plus importante, ce sont des prescriptions hors AMM et les auteurs nous le rappellent direct:
None of these substances has a general indication on the market for insomnia, in the absence of comorbid depression. Off-label use, therefore, is usually standard.
Je me demande quel intérêt il y a à rappeler que c’est hors AMM. C’est écrit sur le VIDAL.
Ils mettent ensuite un tableau avec 8 méta analyses différentes. Du bon boulot. On y apprend pas mal de choses, notamment que les antidépresseurs sédatifs peuvent être moins efficaces que des BZD, que la trazodone est efficace sur à peu près tous les paramètres étudiés ou presque sur une méta analyse de 11 études.
Et ensuite, c’est là que ça commencer à merder.
On aurait pu penser qu’on allait avoir un commentaire sur chaque études. Mais non, ils n’en ont choisi qu’une seule. Celle de 2018. La conclusion les arrange pas mal: toutes ces molécules ont un niveau de preuve très faible.
The meta-analysis by Everitt et al. (2018) suggests that there is only scant evidence for indicating sedating antidepressants in the treatment of insomnia.
Tout le tableau résumé en une étude, ils ont ignoré les 7 autres.
C’est quand même bizarre tout ça, quel était le raisonnement ? On n’a pas d’autre explication.
Je continue:
Significant but small effects were noted for doxepin and trazodone in the short term, up to 4 weeks.
Alors attendez, là non plus je ne comprends pas. Je retrouve en 2 minutes une revue systématique sur la trazodone qui reprend plusieurs études, avec une efficacité sur des durées qui vont parfois jusqu’à 6 mois (ici).
Je fais la même chose pour la doxépine, et la doxépine a été montrée efficace jusqu’à 3 mois (ici). Au passage, la doxépine à ce dosage c’est uniquement antihistaminique, mais je chipote.
Ca commence à sentir une odeur étrange pour nos experts.
Ils nous font un dernier petit rappel sur le fait que c’est hors AMM avant de passer à l’étape suivante:
Longer-term treatment of insomnia disorder (without comorbidities; off-label use) …
C’est donc décidément hors AMM. Qu’on se le dise.
Les “antipsychotiques”
Bon, là je pense que le papier commençait à être un peu long, nos collègues n’en pouvaient plus.
On a d’abord droit à une nouvelle façon astucieuse de dire que les antipsychotiques sont hors AMM; en informant que l’insomnie ne fait pas partie de la notice:
The antipsychotics that explicitly mention insomnia, as an indication in the drug information, are melperone and pipamperone
C’est franchement ingénieux.
Ils nous disent qu’il n’y a aucune RCT sur le sujet:
There are, however, no randomised controlled clinical studies on these substances concerning insomnia disorder, either with or without comorbidities.
On ne sait pas trop de quoi ils parlent. Est-ce qu’il n’y a aucune RCT avec la melperone et la pipamperone ? Je ne sais pas, et ça ne nous intéresse pas vraiment, plus personne ne se sert de ça.
Est-ce qu’il n’y a aucune RCT avec les antipsychotiques dans l’insomnie ? Parce que j’en ai deux avec la quétiapine ici. N’importe quel praticien ayant prescrit de la quétiapine peut attester de son efficacité, c’est même un peu trop efficace.
On n’aura pas plus de précision. Ca se termine comme ça:
Therefore, at present the scientific evidence does not recommend the use of antipsychotics (including quetiapine) in the treatment of insomnia without comorbidities, in either the short or long term.
“Le niveau de preuve n’est pas suffisant pour recommander l’utilisation d’antipsychotiques - y compris la quétiapine”.
On ne sait pas pourquoi; ils n’ont pas pris la peine de nous le dire. C’est pas les raisons qui manquent, mais on n’a droit à aucune explication.
Tant pis pour nous.
Je continue.
Dual orexin receptor antagonists (DORAs)
Ah, nous y voilà. Là c’est byzance. On parle du daridorexant donc. Le daridorexant fait partie de la famille des DORAS. Pour nos auteurs, les DORAS sont la découverte récente la plus importante dans le traitement de l’insomnie.
The introduction of DORAs has probably been the most significant recent development in the pharmacological treatment of insomnia.
Wow. Tant que ça. Et bah, le suvorexant et le lomborexant sont sortis depuis un petit temps déjà et ça n’a pas révolutionné la prise en charge de l’insomnie. On se demande d’où vient cet engouement ?
S’en suit un paragraphe sur le même ton, c’est bien toléré, tout roule…mais ça marche pas du tonnerre non plus par rapport au reste:
..with small to medium effect sizes..
Effets de taille légers à moyens.
On est un peu étonnés de voir les auteurs développer à ce point le nouveau traitement du moment qui coûte une blinde, et être passé aussi rapidement sur d’autres (voire d’avoir complètement ignoré certains).
On a quand même droit à une petite phrase de modération, “vu que le daridorexant n’a pas encore été commercialisé en Europe, il faudra être prudent.”
Considering that at the time of writing daridorexant has not yet been launched in most European countries, caution should prevail
Oui enfin prudents, c’est bien beau de le dire, mais ça n’empêche pas nos experts de mettre une recommendation de grade (A) pour son usage dans l’insomnie aigue, et de plus de 3 mois:
When cognitive-behavioural therapy for insomnia is not sufficiently effective, a pharmacological intervention can be offered (A)[…] daridorexant (A)
Orexin receptor antagonists can be used for periods of up to 3 months or longer in some cases (A)
On va dire que nos confrères se sont un peu laissés emportés par la nouveauté.
Rapportée au nombre de traitements c’est la partie pharmacologie la plus développée du papier. On parle d’un traitement avec absolument aucun recul, en dehors d’une étude d’un an fournie par le fabricant. Vu le prix que ça coûte par ailleurs, il faut être un peu tête brulée pour recommender ça en grade (A), mais j’imagine que nos experts savent ce qu’il font - “on va leur faire confiance” comme disent certains.
Antihistaminiques
La doxépine n’est pas dedans, mais c’est un antihistaminique à faible dose; comme la trazodone. C’est toujours la même discussion de nomenclature, je vous épargne ça.
On nous dit d’entrée de jeu qu’une méta analyse d’il y a 12 ans a conclu que le niveau de preuve était faible, avec un développement rapide de la tolérance.
One systematic review stated that there were no high-quality randomised–controlled clinical studies demonstrating efficacy compared with placebo—concluding that the evidence for these drugs is small and there might also be a rapid development of tolerance (Vande Griend & Anderson, 2012).
Quand on lit la revue systématique citée (Vande Griend & Anderson, 2012), c’est étrange de voir que sont inclus dedans la trazodone, la doxépine, les antihistamines et les tricycliques. C’est comme si en 2012 on avait déjà décidé de classifier ces molécules en tant qu’antihistaminiques. Ils étaient en avance sur leur temps, ou cet article est en retard. Je passe.
Voyons voir ce que ces auteurs nous racontent pour les antihistaminiques - pour voir si ça diffère des guidelines de nos experts:
Déjà, il y en a deux qui ont la FDA approval:
Diphenhydramine and doxylamine succinate have historical FDA approval for the treatment of insomnia
Alors ça aurait été sympa de prévenir le lecteur de ça quand même, non ? On a l’impression que l’intérêt porté par nos experts aux autorisation de mise sur le marché ne sont pas les mêmes selon les molécules.
Je continue de lire leur article, et les auteurs de 2012 ont fait l’erreur de mettre dans le même panier la diphenhydramine et l’hydroxyzine. Tout comme leur contemporains d’ailleurs. Les deux molécules n’ont pas grand-chose à voir sur le plan anticholinergique, mais je vous épargne les détails.
Il suffira de dire pour cette partie que des AMM veilles de 30 ans n’ont pas été mentionnées, et que la précision du papier laisse à désirer.
Melatonin
C’est peut être ma partie préférée. Vous notez qu’ils n’ont pas mis l’agomélatine ici, qui est est agoniste MT1/MT2, mais ils ont mis le ramelteon. Pourquoi pas, qui suis-je pour juger ?
On nous rappelle que la mélatonine est accessible à peu près partout en Europe.
Melatonin is freely available in most European countries.
On nous rappelle ensuite qu’il existe le Circadin - de la mélatonine à libération prolongée, pour ceux âgés de 55 ans et plus, qui a l’AMM:
One substance (prolonged-release melatonin = PR melatonin) has been approved for the treatment of insomnia in patients older than 55 years
On a aussi en France le Slényto, jusqu’à 18 ans. On a de la mélatonine dans l’AMM jusqu’à 18 ans, puis plus rien jusqu’à 55 ans.
Donc entre 18 et 55 ans, soit la mélatonine ne fonctionne plus (si on pratique selon les AMM), soit il y a vide qui n’est que de nature financière, pas scientifique.
Je continue, on nous annonce ici qu’au vu de la littérature, la mélatonine LP peut être utilisée chez les patients de plus de 55 ans:
Given the evidence from studies with PR melatonin, and the fact that many health authorities in Europe have sanctioned its use beyond 4 weeks, PR melatonin, short- and longer-term administration can be considered (≥ 55 years.)…
Regardez-moi dans les yeux et dites moi sérieusement que vous avez déjà vu un médecin ne prescrire de la mélatonine qu’à partir de 55 ans, parce que c’est à partir de cet âge là qu’on peut prescrire du Circadin.
Je pense qu’à ce stade, c’est prendre les lecteurs pour des crétins.
On se demande quel intérêt il y a à faire des guidelines qui:
ne font que suivre l’AMM, n’importe qui peut lire ce qu’il y a noté dans le Vidal.
sont en déconnexion complète avec ce que les auteurs font dans leur pratique. Les auteurs utilisent de la mélatonine avant 55 ans régulièrement, vous pouvez en être sûr.
Je me permets de mettre une méta analyse ici qui statue positivement sur l’usage de la mélatonine.
Les gens utiliseront la forme LP pour les difficultés de maintenance, et la forme LI ou en spray pour l’initiation, ou un mélange des deux s’il le faut. Comme on le fait depuis des décades. Il y a plein d’études sur le sujet. Sans déconner.
Je passe la partie sur Plantes/phytothérapies, il n’y a rien d’interessant pour nous et il faut qu’on avance.
Pharmacologie sur le long terme
Ils nous reparle direct du daridorexant évidemment:
Most studies on the BZs/BZRAs and low-dose sedating antidepressants had treatment durations shorter than 4 weeks, and the phase-III studies on daridorexant were for 3 months (with an extension up to 12 months).
Je rappelle qu’on a plus d’études sur le long terme avec les BZDs/BZRAs qu’avec le daridorexant, mais ça ne les intéresse pas trop visiblement.
Ils concluent donc qu’on peut donner de la mélatonine LP (à partir de 55 ans hein, évidemment, avant aucun labo n’a fait d’études pour avoir l’AMM donc c’est pas scientifique d’en prescrire) et du daridorexant sur le long terme, en étant prudent.
Le daridorexant a donc - grâce à une étude du laboratoire, alors qu’il n’est même pas sorti en Europe - réussi à accumuler suffisamment de recul de sécurité d’emploi que la mélatonine en plusieurs décades, à tel point que les auteurs estiment que les deux molécules se valent.
[…] administration of these drugs for at least 3 months is an option […]
Tout va bien.
Je commence à me lasser un peu et je vous propose d’avancer tranquillement vers la conclusion.
Les auteurs ne sont pas des idiots.
On a eu plus de la moitié du texte portant sur la TCC-I. On aura du mal à leur reprocher de se concentrer sur les traitements.
C’est quand on regarde la conclusion des recommandations que la tendance s’inverse un peu:
3 lignes sur la TCC, qui disent que la thérapie est le traitement de première intention, qu’on peut le donner de façon digitale, et que la restriction du sommeil et le stimulus control sont les ingrédients les plus importants de la TTC.
Voyons comment ils détaillent le côté pharmacologique:
Et bah voilà. 11 lignes sur la pharmacologie. On comprend mieux les mises à jour.
Je ne les traduirai pas, on en a déjà parlé. Notez que ça se voyait déjà sur l’abstract, dont la moitié traite de pharmacologie.
Je me demande quand même si ça diffère tant que ça par rapport à la version de 2017. Si mon raisonnement est bon, ils ont supprimé des éléments concernant les traitements autres que le daridorexant - car ils lui font directement concurrence - pour encourager la prescription de ce dernier.
Voyons voir ça… Je vais mettre en évidence des phrases qui ont disparu du guideline 2023 et qui étaient présentes dans celui de 2017:
Benzos et apparentées: les patients observent une réponse dans 75% des cas et rémission dans 47% des cas. Ca marche pas mal ! pourquoi avoir supprimé cette phrase ?
Pillai et al. (2017) analysed data from one randomized controlled trial with BZRAs according to definitions of treatment response/remission, and observed positive treatment responses in 76.7% of cases and remissions in 47.7% of participants.
Pareil pour la doxépine: une méta analyse entière sur la doxépine qui rapporte son efficacité était rapportée dans les guidelines de 2017. Cette référence a disparu dans la mise à jour:
The meta-analysis by Yeung et al. (2015) dealt exclusively with low-dose doxepin, and showed that there are significant effects on subjective and polysomnographic parameters in the short term.
“Antipsychotiques” pareil, 4 revues systématiques étaient mentionnées en 2017:
There are no meta-analyses on the efficacy of antipsychotics in insomnia, but four related systematic reviews exist
J’abrège, vous avez compris le truc.
Et alors, la prescription sur le long terme, en 2017 ils disaient quoi?
Et bah vous me croirez, vous me croirez, pas, mais en 2017 ils mentionnaient les études avec le zolpidem et l’eszopiclone dont je vous ai parlé !
Incroyable, comme quoi ils ne les ont pas ratées, elles ont juste été supprimées dans les nouvelles guidelines. Je vous mets quelques photos ci dessous, tirées d’un tableau des guidelines de 2017:
Bon, je m’arrête là. Je comprends mieux la mise à jour. Mais que s’est-il passé avec ces guidelines ? Comment est-ce que ça a pu merder à ce point ?
Voyons-voir s’il y a des conflits d’intérêts.
Tout en bas de l’article, on retrouve un lien vers des conflits d’intérêts déclarés (pas vérifiés) des auteurs.
Le grand gagnant des conflits d’intérêts pour nos auteurs, c’est Idorsia.
C’est ce qui revient le plus souvent.
Mais que fabrique le laboratoire Idorsia ?
Le daridorexant. Bingo. Le travail de détective continue.
Je compte 11 auteurs qui ont reçu du fric de la part d’Idorsia, quasiment 25% des auteurs. C’est très mal rempli comme document certains auteurs n’ont pas signé, d’autres ont une déclaration qui semble avoir planté; tout ça n’est pas très sérieux.
Et on ne connaît pas les montants versés. J’ai déjà parlé du médecin Français qui avait 55 000 euros de déclarés sur le site transparence.santé.gouv.fr - qui depuis cette histoire n’affiche plus rien pour ce médecin. En moins de 2 ans. C’est beaucoup de fric. J’en avais parlé sur ce substack, ici.
Mise à jour: le site est revenu, le médecin en question a maintenant 150 000€ déclares.
Quoi qu’il en soit, tout s’explique.
Je tiens à présenter mes excuses pour les lecteurs; car tout ça n’était en fait pas une critique d’article scientifique.
Je précise que je n’ai rien contre la molécule qu’est le daridorexant en soit. La molécule coût 15 fois plus cher que le zopiclone, j’espère qu’elle sera 15 fois mieux. Ce que je dénonce, c’est tout le pognon autour de ça, du laboratoire, mais aussi des médecins.
Ce n’est pas un papier scientifique que nous avons là. Ce ne sont pas des guidelines.
C’est du marketing. Et on a vu une des plus vielles techniques du marketing: taper sur les concurrents.
C’est pour ça que vous avez besoin de psychiatres qui n’ont pas de fric à se faire avec les traitements. Sinon, c’est la jungle.
Je ne déclare pas pour ma part de conflits d’intérêts sur ce sujet, autre que votre abonnement à cette newsletter.
C’est malheureusement extrême y répandu, cf les scandales des reco françaises précédentes sur les anti diabétiques ( le formindep avait fait une action en justice sur la reco Has : https://formindep.fr/le-conseil-detat-abroge-la-recommandation-de-la-has-sur-le-diabete-de-type-2/), les statines et les nombreux conflits d’intérêt ( baisse de la cible thérapeutique majeure 1 vs 0,55 g\ l de Ldl, avec des arguments pas hyper solides, pire encore en 1 ère intention. ).
Zolpidem apparaît recommandé pour des périodes de 4 semaines max. Les études portent sur des périodes de 6 à 12 mois. Je prescris rarement le Zolpidem par crainte de la dépendance et les effets secondaires cognitifs. Quelle est votre expérience ?