Attention, encore un post épique, avec nos experts habituels, et deux tours de force. C’est toujours plus débile.
Pour le premier, nous sommes en 2009. La CPAM saisit la HAS à propos des durées d’arrêt de travail qu’il faudrait recommander.
Dans le cadre de l’article L.161-39 du Code de la sécurité sociale, la Haute Autorité de santé a été saisie par la CNAM-TS par un courrier en date du 10 novembre 2009 afin qu’elle rende un avis sur six référentiels proposant des durées indicatives d’arrêt de travail. Ces documents concernent six pathologies ou procédures : la lombalgie commune, les pathologies anxio-dépressives mineures, la gastro-entérite virale, les varices après intervention (ligature ou stripping), le syndrome du canal carpien après intervention, la ligamentoplastie du ligament croisé antérieur du genou.
Une fois la HAS saisie, ces derniers mobilisent des sociétés savantes, en l’occurence, pour les “pathologies anxio-dépressives mineurs”, les sociétés suivantes étaient:
la Fédération Française de psychiatrie
Le Regroupement des sociétés savantes de médecine générale
Ces derniers font une revue complète de la littérature. Ils ratissent large. Et là, horreur.
Aucune recommandation, méta-analyse ou revue de littérature systématique n’a été identifiée sur ce sujet. Aucune définition de la notion de « pathologies anxio-dépressives mineures » n’apparaît dans la littérature.
Mes chers amis.
Je veux que vous imaginiez la scène.
Les types de la CPAM se disent allez, on va se demander une petit reco.
Ils appellent la HAS. Ils parlent d’un terme qui n’existe pas.
La HAS se dit, hop, on va faire une petite revue de la littérature.
Ils se rendent compte que le terme n’existe pas.
Qu’est ce qu’il se passe ensuite ?
Ce qu’il se passe toujours. Ce que la HAS sait faire de mieux.
Ils ont sorti les données de leur ***.
Selon la Fédération française de psychiatrie, la durée optimale de l’arrêt de travail peut être évaluée entre 7 et 14 jours. Dans de nombreuses situations, une amélioration est obtenue en quelques jours. Dans ces cas, et dès lors que les troubles ne sont pas liés à un stress au travail, la reprise rapide de l’activité professionnelle semble souhaitable.
Est-ce que c’est pas miraculeux ?
Il n’y en a pas un seul dans le lot qui s’est dit qu’il valait mieux utiliser les termes comme le trouble de l’adaptation, l’épisode dépressif caractérisé, et autres.
Ils ne savent pas ce qu’est un trouble anxio-dépressif mineur. Personne ne sait. Mais ils donnent quand même une recommandation d’arrêt de travail entre 7 et 14 jours. Une durée optimale, s’il vous plait.
Et hop, ça part en cuisine:
Après échanges avec les services de la HAS, un référentiel modifié a été transmis par la Cnamts à la HAS (annexe).
Après coup, nos experts se sont sentis - je pense - un peu morveux:
Par conséquent, la HAS ne formule pas d’objection sur les durées d’arrêt de travail indicatives proposées dans le référentiel modifié concernant les pathologies anxiodépressives mineures mais regrette toujours le peu de précision de la définition.
Un peu qu’il y a de quoi regretter.
Qu’est-ce qu’il se passe ensuite ? Vous le savez. Les crétins qui ne voient pas de patients considèrent la durée de 14 jours comme un savoir scientifique, une vérité absolue, et vous commencez à avoir les billes pour aller harceler les prescripteurs.
Je vous renvoie à la vidéo sur le Directeur de la CPAM, assez éloquente.
Vous avez là le mode de fonctionnement de la HAS, de la CPAM, et de certaines sociétés savantes.
Il y a encore 3 jours, le Medef recommandait de “conditionner une partie de la rémunération des médecins au respect de recommandations scientifiques reconnues”. Il y a de quoi trembler devant tant de bêtise.
Mais ça n’est pas tout. Le second miracle concerne le site Info Médicaments.
L’idée est bonne. L’objectif est le suivant:
Mettre à disposition les informations et données autour du médicament aux patients et aux professionnels de santé afin de favoriser un meilleur usage des médicaments.
Ils développent un peu:
Lutter contre la mésinformation et le mésusage
Faciliter la compréhension des notices de médicaments
Responsabiliser la prise de médicament pour un meilleur suivi des traitements
Mettre à disposition en open data des données structurées et à jour
Mais en quoi consiste ce site ?
Et bien c’est simple, ils font des copier-coller des notices des médicaments.
Je rappelle à tous que les notices ne sont là que pour limiter les problématiques médico-légales du laboratoires, sont rédigées avec des auteurs experts des laboratoires fabricants, et non pas des cliniciens.
Sans surprise, c’est rempli de conneries.
C’est comme ça qu’on était tombé sur cette phrase dans la description de la venlafaxine:
Il est admis que les personnes déprimées et/ou anxieuses ont des taux plus faibles de sérotonine et de norépinéphrine dans le cerveau.
Quelle purge.
Aujourd’hui, on m’a envoyé une nouvelle petite:
Le dépakote est dans la catégorie “sédatifs psychiques”.
Oui oui oui. Ils se sont créés une petite catégorie pour l’occasion. Une nomenclature inédite, made in France. Un petit plaisir coquin.
Mais qu’est-ce qu’il y a d’autre dans cette nouvelle catégorie ?
Et bien, par exemple, ils ont mis le lithium. Juste à côté de la cyamémazine, ou du zolpidem.
On a besoin de pas mal de chose en santé.
Mais la dernière chose dont on a besoin, c’est d’avoir des crétins qui s’amusent à créer des catégories de ce style. Le médicament comme le lithium est déjà difficile à accepter, je n’ai pas besoin qu’on s’amuse à le classer comme sédatif, dans la même catégorie que des somnifères purs. Qu’est-ce que les patients vont se dire quand ils vont tomber sur ça ?
Alors que la gouvernement cherche à économiser de l’argent par tout les moyens, la réalité est cruelle: il y a dans le système de santé des personnes qu’on pourrait virer sur le champ. On ferait des économies, et j’ai plein d’idées sur comment on pourrait mieux dépenser l’argent.
Il est grand temps de faire le ménage.
"Au départ était le verbe". Ils façonnent la réalité en nommant. De vraies génies, c'est absolument fascinant !
Reste plus qu'à créer un générateur aléatoire de noms de maladies psychiatriques et enfin ils seront libres de révolutionner le monde de la science 🙏🏻
"Mais la dernière chose dont on a besoin, c’est d’avoir des crétins qui s’amusent à créer des catégories de ce style. Le médicament comme le lithium est déjà difficile à accepter, je n’ai pas besoin qu’on s’amuse à le classer comme sédatif, dans la même catégorie que des somnifères purs. Qu’est-ce que les patients vont se dire quand ils vont tomber sur ça ?"
C'est ce que j'appelle de la "désinformation d'Etat".
Mais quelqu'un peut il donc me dire qui sont les charlatans qui sifflent sur nos tête ????