Les choses que je fais mal - suite

2 ans plus tard, certains patients ont passé le stade du placebo, du nouveau psychiatre avec ses tatouages, son assistant médical, et ses nouveaux traitements. Ils ont une ordonnance qui n’a pas grand chose à voir avec la première, mais une absence de réponse complète.

Certains vont légèrement mieux - en fronçant les sourcils, peut-être qu’ils ont gagné un demi points sur une échelle qui va de 0 à 80 points. Mais sur le plan fonctionnel, rien n’a changé. Il n’y a pas de retour à l’emploi, l’isolement est toujours le même, etc.. Et ça se fait parfois aux prix d’effets secondaires qui n’étaient pas présents avant.

Il existe une sorte de turn-over de la file active qui rend ces patients plus présents - ou du moins, je m’en souviens plus. Il ya deux raisons à ça:

• Les patients qui vont mieux finissent en effet par avoir leurs rendez-vous espacés de plusieurs mois. Ceux qui ne s’améliorent pas continuent de venir à la même fréquence, donc petit à petit, on voit de plus en plus de patients qui ne vont pas bien.

• Les patients qui sortent naturellement de la file active. Ils vont mieux au point de ne pas revenir, arrêtent leur traitement, décident de changer de psychiatre, décèdent ou pour autre raison. Je pense pour ma part qu’il y a plus de patients qui quittent la file active parce qu’ils ne sont pas satisfaits qu’autre chose; mon assistant pense l’inverse. Il est important d’avoir unnautre avis que le sien.

C’est quelque chose que je n’avais pas quand je travaillais à l’hopital. Il est beaucoup plus facile de faire sortir les patients des soins aigus ou des urgences que de les aider à obtenir une vie qui vaut la peine d’être vécue.

Il y a parfois des journées où je suis à peu près convaincu que je ne sers pas à grand-chose.

C’est dans ces moments que l’hopital me manque.

Le temps est souvent le juge de toute prise en charge. C’est une des raisons qui font que les études de 8 semaines pour les autorisations de mise sur le marché sont un scandale.