Je vois beaucoup de débat autour des “antidépresseurs” (type IRS, inhibiteur de la recapture de la sérotonine, prozac et autres), avec des discours très tranchés.
Pour les personnes intéressées, une recherche pubmed très brève permettra d'entrevoir la complexité de la question.
En vrac, vous pourrez voir:
- Que les préoccupations de suicidalité avec les IRS concernent avant tout les patients de moins de 25 ans.
- Que les premières black box warning (grosse étiquette noire sur la boite du médicament, imposée par la FDA) sur le sujet datent de 2003.
- Que cette problématique est très différente selon que l'on observe les idées suicidaires, les comportements parasuicidaires, les tentatives de suicide, ou les suicides aboutis.
- Qu'il y a eu des études dans lesquelles la réduction drastique de prescription d'antidépresseur par les médecins généralistes a conduit à une majoration tout aussi drastique des suicides dans la région.
- Qu'il existe beaucoup de mécanismes différents derrière la "levée d'inhibition" qui n'a jamais été prouvée, comme de l'akathisie ou des états mixtes.
- Que le risque suicidaire n'est pas le même en fonction de chaque IRS, la paroxétine chez les jeunes étant particulièrement préoccupante.
- Que la prescription d'antidépresseur chez un sujet de moins de 20 ans représente d'entrée de jeux une situation à risque sur le plan suicidaire car c'est aussi un indice fort de bipolarité.
- Qu'il existe plusieurs classes d'antidépresseurs et que le bénéfice/risque n'est une source de débat que sur la classe des ISRS/IRSNa; avec une efficacité dans les épisodes dépressifs caractérisés statistiquement significative mais cliniquement trop faible pour être constatée.
- Que l'efficacité du placebo est énorme dans les études sur les IRS, et que cette efficacité diminue quand la gravité de l'épisode thymique augmente
Le débat n'existe que pour les épisodes dépressifs légers.
- Que l'efficacité de ces deux classes dans bien d'autres troubles psychiatriques n'a rien à envier à d'autres médicaments bien acceptés d'autres spécialités.
- Que la première mesure à prendre pour se distancier de l'influence des laboratoires est de se défaire du terme trompeur d'antidépresseur et d'utiliser une nomenclature basée sur les neurosciences et pas les termes des laboratoires pharmaceutiques.
- Que les psychiatres sont au courant depuis des années de la nature inexacte de l'hypothèse sérotoninergique de la dépression, au point qu'elle en est presque complètement fausse.
- Que le contexte a une importance capitale, la prescription d'antidépresseurs de la classe des IRS n'est pas la même selon qu'elle concerne un psychiatre de secteur, un médecin généraliste dans un désert médical ou un gériatre en soins de suite.
Les discours les plus intéressants sont ceux qui voient les nuances.
Méfiez vous des propos absolutistes, il y a peu de choses en médecine qui sont totalement bonnes ou mauvaises, et la psychiatrie reste qu'on le veuille ou non une discipline médicale.