Traduction du Podcast du Carlat Psychiatry Report, disponible ici.
Les phrases en italique ont été rajoutées par moi et ne reflètent pas forcément les opinions des auteurs du podcast.
KELLIE NEWSOME: Nous clôturons notre top 10 des mises à jour de la recherche avec une nouvelle combinaison de médicaments pour le trouble de l'usage de l'alcool, un résultat surprenant pour les antipsychotiques dans la schizophrénie et des recommandations sur les stimulants pour le TDAH.
CHRIS AIKEN : Bienvenue sur le podcast de psychiatrie Carlat, garant d’une psychiatrie honnête depuis 2003. Je suis Chris Aiken, rédacteur en chef du Carlat Report.
KELLIE NEWSOME : Et je suis Kellie Newsome, infirmière en psychiatrie et lectrice assidue de chaque numéro.
Réduction de dose dans la schizophrénie
KELLIE NEWSOME: Notre première étude tranche un débat de longue date sur la schizophrénie. Bien que les antipsychotiques traitent les épisodes psychotiques aigus, ils ne soulagent pas les symptômes négatifs, et certains pensent même qu'ils aggravent les troubles cognitifs.
C’est pour ça que sur les 10 dernières années, plusieurs études ont regardé si le fonctionnement s'améliorait lorsque la dose des antipsychotiques était réduite ou même arrêtée en l'absence d'épisode psychotique actuel. Certains essais disent que oui, d'autres non, mais il est difficile de mener les enquêtes à long terme nécessaires pour répondre à cette question épineuse.
On entend par fonctionnement la capacité du patient à répondre à ses différentes obligations interpersonnelles, professionnelles, sociales, familiales, etc.. On peut être très symptomatique et continuer à fonctionner au quotidien, tout comme on peut n’avoir que peu de symptômes mais ne pas reprendre une activité professionnelle.
CHRIS AIKEN: C'est là qu'intervient cette grande étude de 2 ans menée dans 19 centres différents en Angleterre (on parle d’étude multicentrique). Les patients avaient une schizophrénie stable et ont été randomisés dans deux groupes:
le premier pour réduire progressivement leur dose d’antipsychotique
le second pour rester sur la même dose d’antipsychotique.
La réduction de la dose était très progressive – elle a été réduite de 67 % au cours de la première année, puis encore de 33 % après la deuxième année.
Les résultats n'étaient pas ceux attendus. Il n'y a eu aucune différence sur le critère de jugement principal – le fonctionnement social – dans l'un ou l'autre des groupes, donc la réduction de la dose n'a pas aidé. En revanche, elle a entraîné un risque majeur : il y a eu beaucoup plus d'hospitalisations avec la réduction de la dose: 39% contre 16% dans le groupe qui a maintenu traitement tel quel.
Question réflexe que les habitués de Psychiatrie Internationale auront sûrement: comment les investigateurs se sont-ils assurés que les traitements étaient bien pris; autrement dit comment l’observance a-t-elle été évaluée ?
Mais avant de rejeter la stratégie de réduction des doses, je mentionnerai quelques limites de cette étude.
Premièrement, elle n'a duré que 2 ans, ce qui peut sembler beaucoup, mais l'étude précédente qui a trouvé des améliorations fonctionnelles avec la réduction de la dose a duré beaucoup plus longtemps – 7 ans. Un suivi plus long de cette étude est en cours.
Deuxièmement, une partie de l'essai a eu lieu pendant le confinement du COVID, et il est assez difficile d'évaluer le fonctionnement social lorsque les gens sont tenus de respecter la distanciation sociale.
L'étude a été parrainée par le UK National Institute for Health Research, dirigée par Joanna Moncrieff et ses collègues, et publiée dans The Lancet Psychiatry.
Conclusion : Réduire les doses d’antipsychotiques dans la schizophrénie est une proposition risquée et, à moins que de nouvelles mises à jour de cette étude ne nous disent le contraire, nous ne la recommandons pas.
L’autre élément admirable de cette étude est qu'elle a été mise en place par des chercheurs qui partaient du principe a priori que la réduction de dose permettait une amélioration, et qui sont très dubitatifs quant à l’efficacité des antipsychotiques sur le long terme. Ils avaient une hypothèse, et ils ont réalisé une étude pour la vérifier.
C’est comme ça que la science progresse.
Doses élevées de stimulants dans le TDAH
KELLIE NEWSOME: Nous sommes dans la dernière ligne droite de nos 10 principales conclusions, avec 3 dernières études. Nous avons couvert certains de ces sujets dans des épisodes précédents du Podcast, mais restez attentif, car nous avons de nouvelles mises à jour à partager.
CHRIS AIKEN: Que faites-vous lorsqu'un patient se présente avec 80 mg d'Adderall (contenant de la d-amphétamine et de la l-amphétamine) ou 100 mg de méthylphénidate ? Cette prochaine étude nous indique à partir de quand une dose de stimulant devient “trop élevée”.
KELLIE NEWSOME : Cette étude est une revue systématique et une méta-analyse menée par un groupe international dirigé par Luis C. Farhat et publiée dans le JAMA Psychiatry. Ils ont inclus 47 essais contrôlés randomisés sur le TDAH adulte, la plupart ayant des administrations de stimulants de manière flexible. Les doses de méthylphénidate allaient de 15 mg à 82,5 mg (en équivalent Ritaline), et celles d'amphétamines de 12,5 mg à 75 mg par jour, en équivalent d'Adderall. Si vous utilisez de la dextroamphétamine, la dose équivalente est de 10 à 60 mg, et pour le Vyvanse, elle est de 30 à 170 mg. Ils ont ensuite tracé les courbes dose-réponse ainsi que les courbes des effets indésirables — ces derniers n'étant pris en compte que s'ils entraînaient l'arrêt du traitement.
Un dosage flexible permet aux investigateurs de modifier le dosage en fonction de la réponse et de la tolérance des patients. C’est à opposer aux études avec des dosages fixés, dans lesquels le dosage n’est pas modifié.
Pour le méthylphénidate, les bénéfices ont commencé à plafonner à 35-40 mg, mais il restait un petit avantage – et peu de risques – à aller plus haut, au moins jusqu'à la dose maximale approuvée par la FDA de 60 mg. Aller au-delà de 60 mg entraînait de très petits gains supplémentaires mais doublait le risque d'effets secondaires problématiques. Pour le méthylphénidate, il est donc imprudent de dépasser 60 mg par jour, et les gains entre 40 et 60 mg sont marginaux. Si vous passez au dexméthylphénidate, comme le Focalin, il suffit de diviser ces doses par deux, donc la plage maximale est de 20 à 30 mg. Le dexméthylphénidate seul n’est pas disponible en France.
Souvenez-vous que ce sont des résultats qui s’appliquent à la moyenne des patients.
Pour les amphétamines, la situation est différente. Les bénéfices s'arrêtent brusquement à une dose quotidienne modérée de 30-35 mg (équivalents Adderall). Contrairement au méthylphénidate, il n'y avait aucun bénéfice supplémentaire à augmenter au-delà de 30-35 mg. Cependant, les effets secondaires augmentaient de manière constante, et contrairement au méthylphénidate, où les effets secondaires culminaient après 60 mg, les effets secondaires des amphétamines augmentaient régulièrement sur toute la plage posologique.
Les courbes n’étaient évidemment pas dans le podcast. Quand vous entendez parlez de courbes, ne vous contentez jamais de la description. Allez les voir directement. Pour la courbe de gauche, vous voyez la taille d’effet en fonction de la dose, et pour celle de droite les risques d’arrêt du traitement en fonction de la dose.
Cette plage de 30 à 35 mg concerne les sels d'amphétamine mixtes, également connus sous le nom d'Adderall. Si vous utilisez la dextroamphétamine (Dexedrine), la dose équivalente est de 25 à 30 mg. Et si vous utilisez la lisdexamfétamine (Vyvanse), l'équivalent est de 70 à 80 mg.
KELLIE NEWSOME: Mais attendez une minute. La dose maximale approuvée de Vyvanse est de 70 mg, ce qui correspond à la limite de l'étude. Mais la dose maximale d'Adderall approuvée est de 40-60 mg, ce qui est bien plus élevé que la limite de l'étude.
CHRIS AIKEN: Oui, voici ce qui se passe. Le Vyvanse libère l'amphétamine à un rythme très régulier, il n'y a donc pas de pics importants. D'autres produits à base d'amphétamine, comme l'Adderall, provoquent des pics – ils libèrent essentiellement une trop grande quantité de la dose en une seule fois. La plupart des médicaments font cela à un certain degré, mais avec les stimulants, c'est plus problématique car ces pics et creux peuvent provoquer des sensations inconfortables pour certains patients et augmenter les propriétés addictives pour d'autres.
Quoi qu'il en soit, comme le Vyvanse ne gaspille pas une grande partie de sa dose avec ces pics inutiles, il parvient à maintenir une libération constante. Ce mois-ci, dans le rapport du Carlat, nous proposons une analyse complète du Vyvanse, désormais disponible en version générique, et nous concluons que son mécanisme de libération unique en fait un choix de premier ordre parmi les amphétamines.
Le Vyvanse n’est évidemment pas disponible en France.
KELLIE NEWSOME : Cette étude nous indique qu'en moyenne, il n'est pas utile de dépasser, disons, 35 à 60 mg de méthylphénidate ou 30 à 35 mg d'Adderall, mais elle ne nous dit rien sur les cas exceptionnels. Est-ce qu’il y n’y a pas des cas rares où des doses plus élevées sont sûres et efficaces ?
CHRIS AIKEN : Je vais faire le pour et contre. Pour le pour, il y a une analyse secondaire d'un des essais inclus dans cette analyse. Il s'agit d'une étude de 2006 menée par Richard Weisler et ses collègues, qui a randomisé 255 adultes atteints de TDAH pour recevoir de l'Adderall à des doses de 20 mg, 40 mg, 60 mg et un placebo. De manière surprenante, il n'y avait aucune différence entre les trois doses — elles ont toutes produit des résultats similaires sur les échelles de mesure du TDAH. Cependant, les auteurs ont réanalysé les données en comparant les patients atteints de TDAH sévère à ceux présentant des formes légères à modérées. Et en effet, la dose plus élevée a été plus efficace dans les cas de TDAH sévère. Donc, passer à 40-60 mg pourrait se justifier dans les cas graves.
Question : comment évalue t-on dans l’étude la sévérité du TDAH? sur le nombre de critères? leur intensité? l’impact fonctionnel?
Pour le contre: Ce que je vois de plus en plus chez les adultes, ce n'est pas tant des cas de TDAH sévère, mais des cas de TDAH avec de nombreuses comorbidités — trouble de stress post-traumatique (TSPT), autisme, traumatisme crânien, troubles liés à l'usage de substances, trouble bipolaire, etc. Lorsqu'il y a de nombreuses comorbidités, cela ne signifie pas que le TDAH n'est pas réel — bien que si le patient souffre de schizophrénie, je ne diagnostiquerais pas un TDAH et je n'utiliserais pas de stimulants. Mais le TDAH peut coexister avec le trouble bipolaire – 10 à 20 % des personnes atteintes de trouble bipolaire ont également un TDAH. Donc, le TDAH peut être réel, mais en présence de comorbidités, le diagnostic est moins certain et il est moins probable que l'on obtienne une récupération complète. Ce que je vois en pratique, c'est que ce sont ces patients avec de multiples comorbidités qui finissent par augmenter leur dose vers des plages plus élevées. Et c'est là que nous commençons à voir beaucoup de problèmes, en particulier avec les amphétamines. Les amphétamines sont le modèle animal de la manie et de la psychose, et elles ont tendance à provoquer beaucoup plus de problèmes psychiatriques que le méthylphénidate.
Dans une étude publiée dans le New England Journal of Medicine, il a été constaté qu'elles étaient associées à un risque de psychose doublé. Une autre étude plus récente, publiée dans l'American Journal of Psychiatry, nous en dit davantage sur ce risque. L'étude date de septembre 2024, donc elle est un peu trop récente pour figurer dans ma revue annuelle, mais je vais l'intégrer rapidement car elle est très pertinente.
Il s'agit d'une étude cas-témoins basée sur les dossiers de santé électroniques de l'hôpital McLean, qui a examiné les probabilités de développer une manie ou une psychose après le début d'un traitement par stimulants. Environ 4 000 patients ont été inclus. Les chercheurs ont constaté un risque multiplié par 5 de développer une psychose ou une manie avec les amphétamines prescrites, et ce risque a considérablement augmenté au-delà d'une dose de 30 mg par jour de dextroamphétamine, ce qui équivaut à environ 35 mg par jour d'Adderall – la même dose à laquelle les problèmes avaient déjà été signalés dans l'étude précédente. En revanche, aucun risque de manie ou de psychose n'a été observé avec le méthylphénidate.
Ce qui ne veut pas dire que le risque est nul, loin de là.
Je pourrais en parler encore et encore, et en fait, je le fais – si vous voulez tout savoir sur les risques des amphétamines par rapport au méthylphénidate, de la neurotoxicité au risque suicidaire, consultez mon webinaire Carlat sur le méthylphénidate vs les amphétamines.
KELLIE NEWSOME: Notre prochaine étude a examiné ce qui se passe lorsqu'on administre des stimulants — en l’occurrence de l'amphétamine — à des adultes atteints de TDAH et de trouble de l'usage du cannabis.
Les auteurs ont utilisé des doses élevées d'amphétamines — 80 mg d'Adderall par jour — et les ont comparées à un placebo dans cet essai randomisé. Tous les participants ont aussi reçu un accompagnement en matière de consommation de substances. L'étude était de petite taille et les taux d'abandon étaient élevés, nous ne pouvons donc pas tirer de conclusions significatives. Néanmoins, nous avons été surpris par les résultats — même à cette dose élevée, les amphétamines n'ont eu aucun effet — aucune différence sur les symptômes du TDAH, et aucune différence sur l'arrêt du cannabis.
Nous avons donc cherché d’autres études. Il en existe une autre sur le cannabis et le TDAH, qui a examiné une large population d'adolescents recevant du méthylphénidate. Là encore, les stimulants n'ont eu aucune supériorité par rapport au placebo, ni sur la consommation de drogues, ni sur les symptômes du TDAH. Il existe également deux essais randomisés sur l'atomoxétine qui n'ont montré aucune différence, ni sur la consommation de cannabis, ni sur les symptômes du TDAH.
Ma femme refuse par exemple souvent de mettre qui que ce soit sous méthylphénidate s’il y a des consommations de cannabis concomitantes.
CHRIS AIKEN: Ce ne sont que quelques études, donc pas assez pour tirer des conclusions définitives, mais cela suggère au moins que nous devons avertir les patients. S'ils consomment du cannabis, il est probable que cela annule tout bénéfice du stimulant, et les patients ne sont probablement pas conscients de cela. Dans les enquêtes d'opinion, les patients ont tendance à penser que le cannabis aide le TDAH, alors qu'en réalité, toutes les études montrent qu'il aggrave les symptômes du TDAH, en particulier lorsqu'il est consommé avant l'âge de 25 ans.
Il y a à mon avis peu de choses que les patients peuvent faire pour ruiner leur pronostic qui soient pires que des consommations régulières d’alcool ou de cannabis.
Une élément qui manque dans toutes ces études, c'est la mesure de la quantité de cannabis. Certaines personnes ne le consomment que le week-end, et nous ne savons pas à partir de quel seuil il bloque les bénéfices du stimulant. Au-delà de l'avertissement à donner aux patients, il n'existe pas de recommandations claires sur la conduite à tenir. Certains utilisent des tests de dépistage urinaire de drogues et évitent les stimulants en cas de signe de consommation de drogues. D'autres optent pour des traitements non stimulants (atomoxetine, antidépresseurs tricycliques, bupropion, etc..), tandis que d'autres encore donnent le bénéfice du doute aux patients et tentent de traiter le TDAH, espérant que le fait de garder les patients dans le parcours de soin leur sera plus bénéfique que de les exclure.
Prazosine et cyproheptadine dans le trouble de l'usage de l'alcool
CHRIS AIKEN: Dans les troubles liés à l'usage de substances, l'importance de la thérapie par rapport aux médicaments dépend de la substance. Pour les opioïdes, l'approche médicale – traitement assisté par les médicaments (MAT, medication assissted therapy) – est essentielle, et la thérapie est optionnelle.
Hmm, je ne sais pas si je serais allé jusqu’à dire que la thérapie est optionnelle, mais elle est en tout cas nécessairement accompagnée d’une pharmacothérapie.
Pour les troubles de l'usage de l'alcool, les médicaments sont optionnels et la thérapie est essentielle. Nos médicaments pour le trouble de l'usage de l'alcool ne sont pas assez efficaces, donc si vous n'obtenez pas de résultats avec l'acamprosate ou la naltrexone, et si vos patients n'adhèrent pas au disulfirame, cette prochaine étude vous offre une option supplémentaire.
J’aurais rajouté le topiramate, hors AMM.
Il s'agit d'un essai financé par l'industrie, mais ils ont testé deux médicaments génériques de longue date : la prazosine et la cyproheptadine. La cyproheptadine est un antihistaminique des années 1960 utilisé pour les allergies, et la prazosine est un antihypertenseur également utilisé dans le PTSD (état de stress post traumatique).
Le fait que les médicaments soient génériques n’a pas réellement d’importance, si ça débouche sur une AMM, les fabriquant feront des dosages qui ne sont pas accessibles avec les génériques, et les assurances rembourseront aveuglément.
Les chercheurs ont divisé les patients en trois groupes : une combinaison à faible dose, une combinaison à forte dose et un placebo. Tous les patients ont reçu une psychothérapie de base utilisant un modèle de conseil empathique adapté aux soins primaires - donc faisable en médecine générale.
Après 3 mois, les groupes ayant reçu la combinaison à forte et à faible dose ont montré une amélioration significative du critère principal — la consommation totale d'alcool — par rapport au placebo. La taille de l'effet se situait dans la plage moyenne, ce qui suggère une différence significative. Ceux qui buvaient le plus ont tiré le plus grand bénéfice.
L'étude a été menée par Henri-Jean Aubin et ses collègues et ils l’ont publiée dans la revue Addiction en juillet dernier.
Nous trouvons peu de défauts à cette étude, hormis la nécessité de la reproduire sur des populations plus larges, ce qui est à prévoir étant donné qu'il s'agissait d'un essai de phase II parrainé par Kinnov Therapeutics. J'ajouterai cette combinaison à ma liste d'options hors AMM, en particulier pour les patients souffrant de PTSD — car la prazosine et la cyproheptadine améliorent toutes deux les cauchemars. Si vous décidez de les utiliser, il est préférable de les utiliser ensemble. Rappelez-vous que la théorie ici est qu'ils rééquilibrent les systèmes sérotoninergique et noradrénergique — en n'utilisant qu'un seul des deux, l'équilibre serait rompu, et dans les essais sur les animaux, ils n'ont pas fonctionné de manière isolée.
KELLIE NEWSOME: Du moins, c’est ce qu’ont écrit les auteurs, mais nous ne sommes pas certains que ce soit totalement vrai. Il existe quelques études sur la cyproheptadine dans l’usage de l'alcool, remontant à 1964. Quant à la prazosine, elle a une histoire encore plus riche dans ce domaine. Bien que les essais sur la prazosine montrent des résultats mitigés, il existe des signaux indiquant qu'elle peut bien fonctionner seule, en particulier chez les patients souffrant de symptômes sévères de sevrage d'alcool. Bien qu'elle ne traite pas directement le sevrage alcoolique, elle aide les patients à mieux faire face à ces symptômes – et à rester sobres. La prazosine réduit également la consommation d'alcool chez les patients atteints de PTSD, et elle a récemment renforcé l'effet de la naltrexone dans un petit essai randomisé chez des vétérans souffrant d'un trouble de l'usage de l'alcool. Les doses dans cet essai étaient de 50 mg de naltrexone et de 4 mg de prazosine deux fois par jour.
CHRIS AIKEN: En résumé, si vous voulez essayer dès maintenant, la combinaison prazosine-cyproheptadine élargira votre liste d'options pour le trouble de l'usage de l'alcool, en particulier chez les patients souffrant de PTSD. Si vous n'êtes pas convaincu, attendez le second essai ou l'approbation de la FDA. Voici comment utiliser ces médicaments.
Pour la prazosine, le point le plus important est de commencer avec une faible dose, car le risque le plus élevé d'hypotension et de chutes se produit avec la première dose. Je commencerais par 1 mg le soir et j'augmenterais progressivement de 1 à 2 mg tous les quatre à sept jours, jusqu'à atteindre un objectif de 5 à 10 mg par jour. À 5 mg par jour, vous pouvez commencer à administrer une partie de la dose le matin, environ 25 % de celle-ci. La plage de 5 à 10 mg est celle utilisée dans l'étude actuelle pour le traitement de l'alcoolisme, mais vous pouvez aller plus haut — jusqu'à 25 mg/jour pour les hommes et 12 mg/jour pour les femmes — dans le cadre du traitement du PTSD. L'effet secondaire principal est l'hypotension orthostatique, il faut donc la vérifier lors des consultations.
Attention à la différence entre la prazosine LP et LI, nous n’avons que la prazosine à libération prolongée en France.
Pour la cyproheptadine, les principaux effets secondaires sont la prise de poids et la fatigue, je la donnerais donc entièrement le soir — et elle peut améliorer l'insomnie. La cyproheptadine a un profil pharmacodynamique similaire à celui de la mirtazapine — en fait, elle a même amélioré la dépression dans une petite étude — donc si vous êtes à l'aise avec la mirtazapine, vous devriez l'être aussi avec la cyproheptadine. Commencez par 4 mg le soir et augmentez jusqu'à l'objectif de 8 à 12 mg. Vous pouvez la commencer en même temps que la prazosine ou les espacer. La demi-vie de la cyproheptadine est de 8 heures, et dans cette étude, elle a été administrée deux fois par jour, mais si la fatigue devient un problème, vous pouvez déplacer la majeure partie - voire la totalité - de la dose au soir.
Psychose chez les magiciens
KELLIE NEWSOME: Nous avons une étude bonus : une étude amusante sur la psychose chez les magiciens. De temps en temps, les chercheurs en psychiatrie se penchent sur les professions créatives et, inévitablement, ils découvrent qu'un trouble mental ou un autre est plus fréquent chez les âmes artistiques. C'est une observation vieille comme le monde, qui remonte à Aristote, et qui ne mérite pas de figurer dans le top 10. Mais, dans cette étude publiée dans le British Journal of Psychiatry, les chercheurs sont revenus les mains vides, et cela a retenu notre attention.
Gil Greengross et ses collègues ont recherché des traits autistiques et psychotiques chez un échantillon de 196 magiciens professionnels, qu'ils ont comparé à un groupe témoin similaire sur la plupart des points, à l'exception de la pratique de la magie. À leur grande surprise, les magiciens ne présentaient pas plus de traits autistiques, et en réalité avaient même moins de traits psychotiques que le groupe témoin.
S'ils avaient assisté à un spectacle de magie, ils l'auraient peut-être su depuis le début. Le magicien est la personne rationnelle.
C’est le public qui a une perception fragile de la réalité.
Retrouvez d'autres mises à jour de recherche dans l'épisode d'octobre du Carlat Psychiatry News. Nous couvrons de nouvelles recommandations sur le sevrage des benzodiazépines et de nouvelles études sur le brexpiprazole dans le PTSD, les antidépresseurs dans le trouble bipolaire, la kétamine orale, l'huile de CBD, les cigarettes électroniques et les prescriptions frauduleuses de stimulants.
Aperçu du quiz CME
1. Quelle est la principale limite de cette nouvelle étude sur la prazosine et la cyproheptadine dans le trouble de l'usage de l'alcool ?
A. Une absence de base physiopathologique pour expliquer les résultats
B. Les résultats n'étaient positifs que sur des critères secondaires
C. Absence de réplique dans un deuxième essai
D. Taux d'abandon élevé
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Merci aux éditeurs du Carlat pour leur confiance.
Bonjour,
C'est intéressant, merci.
Concernant le dosage du Mph dans le cadre du tdah, les doses sont évaluées par jour, et ne prennent pas en compte les durées d'action du traitement, qui peuvent varier en fonction du métabolisme de chacun.
Donc sur une dose journalière finale, certains patients prendront des doses élevées en peu de prises, d'autres auront sûrement une prise de plus dans la journée mais le dosage par prise sera plus bas.
Est-ce que les risques peuvent varier en prenant en compte ces éléments ?
Est-ce qu'il existe des évaluations de risque qui prennent en compte ces éléments ?